Thierno Diallo, arbitre guinéen à 18 ans

25 février 2012

Thierno Diallo, arbitre guinéen à 18 ans

Il kiffe le rap, aime les croque-monsieur au saumon, adore le marketing. Mais sa passion reste le foot. Ses copains tapent dans le ballon, lui applique les règles du jeu. Il correspond à la loi N° 5 : Arbitre.

Il a potassé un bouquin de 400 pages compilant les dix-sept règles et articles qui régissent le football, accompli un stage d’un mois sanctionnée par un examen théorique et pratique. Il a ferraillé dur pour obtenir le sésame. L’effort a payé. Thierno Diallo, 18 ans, détient une licence d’arbitre de football depuis trois ans. Aujourd’hui, il dirige des matchs des moins des 17 ans (U-17) dans tout le district des Yvelines (France).

Inscrit en classe de 1ère, Sciences et technologies de gestion (STG) au lycée Jean-Baptiste Poquelin de Saint Germain-en- Laye (Yvelines), Thierno est un bosseur. Il partage ses weekends entre révision des cours, travaux domestiques et sa passion d’arbitre, en passe de devenir une profession.

Il est 10 heures ce dimanche matin. « Lettre à mon public » de Kerry James entre les deux oreilles, il prépare son sac. Cartons (Jaune et Rouge), un sifflet, une montre, un maillot, une fiche de paie et l’indispensable licence. Direction Houilles-Carrières, à 10 minutes de chez lui (Vernouillet). Son ancienne équipe Houilles, affronte Château, deux formations des moins de17 ans. C’est donc avec une certaine émotion qu’il officiera le match cette après-midi. « Ça va être un peu dur, mais faut que je le fasse », sourit-il, dans un accent de jeune banlieusard de Paris. Sa « M’man », comme il appelle sa mère avec qui il habite, le dépose en voiture.  Elle ne cache pas sa fierté pour son fils. « Il apprend à se prendre en main », se réjouit-elle.

Thierno perçoit une rémunération qui varie entre 65 (pour les 14-15 ans) et 76 euros (16-17 ans) par match ; avec un minimum de quatre matchs par mois. De quoi se faire un peu d’argent de poche « pour me coiffer, m’acheter des chaussures et économiser pour les études post-bac » explique-t-il ; avant de se reprendre : « mais aussi d’envoyer un peu de sous au pays». Bosseur, mais aussi généreux envers les siens. Lui qui dit pouvoir s’habiller avec 50 euros au Marché à Puces de Clignancourt (quartier de Paris), raille « des gens qui dépensent de fortes sommes dans de vieux habits ». Bosseur, généreux et modeste donc. Le gendre parfait !

Quand Thierno parle du pays, il fait référence au sien, la Guinée. Cet enfant peulh taillé dans du roc (1m 75, 68 kilos) est né à Conakry des parents originaires de la préfecture de Pita (350 km de Conakry). Il y fait ses premiers pas d’écolier, notamment à Wanidara (quartier nord Conakry), puis au village à l’école primaire de N’diré (Timbi-Madina, Pita).

Fin 2002 il débarque à Paris au côté de sa mère. Ils habitent Saint Germain-en-Laye, quartier général du club éponyme (PSG). Ils ont même le privilège singulier d’être à un jet de pierre de « Château-Vieux » et du stade d’entrainement des Parisiens ! Une baraka pour le poussin, amoureux du ballon rond et des croque-monsieur au saumon qu’il prépare lui-même.

Le petit Thierno intègre le club US Lepecq (Yvelines) au poste de milieu de terrain (N° 6), il se fait vite remarquer. Mais au fil du temps la passion de l’arbitrage prend le dessus. La raison ? « J’avais envie de connaitre les règles du jeu. J’aime l’autonomie que donne le métier d’arbitre ». Ça lui permet tout aussi de bourlinguer et de découvrir des contrées lointaines.  « Parfois on me demande d’aller arbitrer un match dans un coin que je ne connais pas, je regarde juste sur une carte et j’y vais ».

Aujourd’hui le rêve de Thierno est d’intégrer le prestigieux Centre Régional de Formation Jeunes Arbitres – Pôle espoirs de Paris et d’embrasser une carrière internationale. « Arbitrer les matchs de la CAN se serait bien hein » rêve-t-il. Son cœur balance tout aussi pour un BTS en Marketing, pourquoi pas un Master. Car devant sa passion de l’arbitrage la lucidité lui rappelle qu’une « carrière d’arbitre dure 10 ans. Il faut avoir un métier ». Préfère-t-il vivre en France ou en Guinée après ses études ? Choix cornélien. « J’aimerais vivre en Guinée, sans être coupé de la France, cette dernière m’a beaucoup donné », répond-il  après une longue hésitation.

En mars prochain, Thierno Diallo espère enregistrer un morceau de rap avec son pote Hatim, vainqueur d’un concours initié par le rappeur français Mister U (Younes Latifi). Une perspective qui l’enchante : « ça va être cool ».

Avec un bon niveau d’anglais, une maitrise quasi-parfaite de l’allemand (il a passé six mois à  Hanovre), ce garçon a plus d’une corde dans son arc. Pour son bien et probablement celui de son pays de naissance, la Guinée. Prrrrrrrrrrrrr!!!!

 

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