L’harmattan, un vent méchant
Rhume, bronchite, peaux rêches, lèvres gercées, cheveux cassants, …tel est le spectacle qu’il laisse dans son sillage à chacun de ses passages. Il, c’est l’harmattan. Ce vent chaud et sec, originaire du Sahara soufflant vers la côte, fait rage en ce moment dans bien de pays de l’Afrique occidentale.
De décembre à février, la Guinée est frappée de plein fouet. A des degrés différents, les quatre régions naturelles du pays sont affectées. La Guinée Forestière au Sud et La Basse Guinée à l’Ouest semblent être les moins touchées. En moyenne Guinée, au centre, pays de plaines et de plateaux escarpés, le thermomètre peut afficher jusqu’à cinq degrés dans les villes de Dalaba et de Mali au mois de janvier. La Haute Guinée à l’Est, aux portes du Sahara, sert de bouclier pour le reste du pays. Cette région à la végétation de savane, est la plus affectée par la rigueur de l’harmattan qui devient ici cinglant.
Cependant, les conséquences du passage de ce vent sec sont partout identiques : des lèvres gercées aux commissures, des peaux pâles et rêches, des cheveux qui cassent, une épidémie de rhume et de grippe…Plus grave, l’harmattan favorise la prolifération du bacille de Koch, responsable de la tuberculose, à cause de la poussière qui fait partie du décor de nos villes.
Les conséquences de ce méchant vent étant partout identiques, tout le monde n’est pas pour autant affecté de la même manière. Les personnes ayant une déficience immunitaire sont plus vulnérables. Leur peau pâle, vire vers un teint hâlé, terrain fertile pour la teigne et le pityriasis versicolore. Dans les villages, les enfants malnutris, aux ventres bedonnants, portent sur la peau des rayures disparates leur donnant un aspect de zèbre.
Pour les demoiselles, plus soucieuses de leur apparence, leurs sacs à main contiennent une véritable armada de produits cosmétiques : brillants-lèvres qu’on sort à tout bout de champ, crèmes à l’hydroquinone, miroirs, deo, kleenex, etc. Elles sont à l’origine du pic qu’atteint un certain nombre de produits saisonniers. En fait, si l’arrivée de l’harmattan surprend beaucoup de personnes, y en a par contre qui s’y préparent soigneusement : les vendeurs de pullovers et de produits cosmétiques. Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, décembre-janvier-février constitue une période de traite pour cette catégorie de marchands. Dans les marchés locaux, le prix des pulls « Donka Félé » atteint des sommets et celui des crèmes pour corps devient parfois vertigineux.
Enfin, pour les riches, classe VVV (Villa, Voiture, Visa) la rigueur de l’harmattan est un lointain écho leur parvenant occasionnellement au détour d’une conversation. Le micro climat dans lequel ils baignent au quotidien à la maison, en avion, dans la voiture, ou au bureau leur fait oublier qu’il y a une alternance des saisons.
Comme quoi, l’harmattan, un méchant vent reste vain devant les « Vrais ».
Alimou Sow
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