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    Ma guinée plurielle
      Article : Lectures déambulatoires dans les rues de Conakry
      Vie urbaine
      11
      31 décembre 2015

      Lectures déambulatoires dans les rues de Conakry

      20151220_102441Matin frisquet de fin décembre. Le klaxon strident du train minéralier, faisant écho à la voix amplifiée du muezzin, déchire l’aube naissante dans une chorale sublime. Une ombre en haillons faufile entre deux murs, une planche garnie de baguettes de pain en équilibre sur la tête. A l’est, le soleil, l’air timide, entame l’ascension harassante du mont Kakoulima. Conakry émerge progressivement de son lit, drapée d’un épais voile formé par les volutes de poussière et de fumée s’échappant des vieilles guimbardes devenues le décor de la ville.

      Comme à l’accoutumée, je suis débout dès potron-minet. Baskets aux pieds, maillot de jogging au dos, je mets à profit quelques jours de congé de fin d’année pour dégonfler une petite bedaine qui commence à s’installer sournoisement me flanquant un aspect d’officier des douanes africain. La pente raide sur la route qui traverse notre quartier est une sacrée aubaine. Je vous en dirai des nouvelles, l’année prochaine…

      Cette activité sportive, sporadique, est également une aubaine pour redécouvrir Conakry sous un autre jour : celui de l’écriture et des inscriptions urbaines.

      Ça a l’air totalement badin mais ma curiosité innée et mon amour acquis pour la lecture m’ont permis de comprendre que Conakry est un véritable livre ouvert. On peut y lire les transformations continues de la ville, son essor économique, ses fantasmes et ses codes mais aussi ses douleurs et ses plaies cicatrisées ou encore ouvertes. Pour peu qu’on y prête attention, Conakry parle à celui qui écoute, instruit celui qui lit.

      Pour s’en rendre compte, le meilleur moyen est de déambuler dans les quartiers, de préférence à pied.

      Sur les deux principaux axes routiers de la capitale, les autoroutes Fidel Castro et Leprince, le florilège des affiches publicitaires géantes témoigne de l’entrée de la ville de plein pied dans la société de consommation qui s’universalise. Ici, un panneau d’opérateur de téléphonie mobile annonce des tarifs mirobolants, là une société de paris incite à miser gros pour toucher le jackpot. Miroir aux alouettes pour une jeunesse en proie au chômage, déchirée entre espoir de rester et rêve de partir.

      Entre les deux affiches, brusque changement de thème : un Alpha Condé candidat, costume-cravate, étale sur 18 mètres carrés de vinyle un sourire photoshopé. Le slogan de campagne qui barre le panneau est sans appel : « Le progrès en marche ». Ma curiosité également, Monsieur le président. En avant.

      Plus loin, sur les hauteurs de Bambéto, une main anonyme a tracé à la chaux sur un pan de mur branlant : « Vive l’UFDG ». A côté, on distingue le dessin maladroit d’un lance-pierres. Mieux que quiconque un gendarme de Conakry sait interpréter ce « message » dans ce  quartier qualifié, à tort ou à raison, de « contestataire ». Le « combat » politique s’étale à ciel ouvert.

      Redescente dans cet autre quartier de banlieue : Sangoyah. Une épaisse couche de poussière ocre tapisse les toitures des maisons en taules ondulées. Quand les ruelles sont bitumées, elles mènent généralement chez un ancien dignitaire du pouvoir. Mais shiitt, mieux vaut se taire car comme partout ailleurs, les murs ont des oreilles. Mieux, ici ils parlent !

      Justement à l’angle des deux rues, on peut lire au mur, écrit par un riverain dans un français approximatif, « interdit de jeter des ordures ici, amende 150.000 FG ». Une interdiction que portent quasiment tous les murs de Conakry. Elle matérialise le conflit entre voisins autour de la gestion des déchets que l’on balance où l’on peut, faute de collecte et de circuits de ramassages organisés et efficaces.« Interdit d’uriner ici » est l’autre inscription qui décore les murs des quartiers ; baromètre de l’absence de toilettes publiques.

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      Au-delà du montant de l’amende qui varie suivant la courbe de l’inflation (dans le années 90, elle tournait autour de 5.000 francs), les deux formules sont souvent complétées par une menace de sévices corporels auxquels s’exposent les contrevenants. Ainsi, on retrouve les variantes : « interdit d’uriner ici, amende 100.000 francs, plus 50 coups de fouet », «amende 200.000, plus bastonnade », « amende 50.000, plus 2 heures de combat ». La meilleure que j’ai trouvée, est celle qui, pour souligner la rigueur de la punition, était illustrée d’une image montrant une paire de ciseaux qui coupent un pénis urinant. Aïe !

      Douloureux aussi est le pari fou de ce… malade mental qui prend les fondations de l’échangeur de l’aéroport Gbessia pour un tableau qu’il s’acharne à peindre à la craie ou au charbon de bois. Des bouts de phrase sortis des méandres de son imagination alternent avec des célèbres proverbes et des citations d’auteurs connus. Un monologue en écriture, le temps que l’impitoyable flotte de Conakry lave les murs du pont. Puis, notre artiste se remet à l’œuvre, et le cycle recommence.

      Les taxis, eux, ont choisi l’encre indélébile pour faire parler leurs engins sans âge. Si à Dakar, les taxis-ville arborent une queue de vache à l’arrière-train, ceux de Conakry sont porteurs de messages. Messages de gratitude à l’endroit du Seigneur, « Grâce à Dieu », aux parents, « Grâce à ma mère », ou à un obscur bienfaiteur, « merci maitre ». Ces bout de phrase peints sur les véhicules en disent long sur la traversée du désert de leurs propriétaires qui ne cachent point leur joie d’en sortir. Sur un taxi inter-urbain au décor exubérant, l’on précise que c’est la réussite de « l’enfant de Horé-Fello ». Un Magbana suranné porte, lui, tout « l’espoir de Banamorydougou ».

      Un poids lourd au moteur fatigué ploie sous des tonnes de bananes plantain en provenance du sud du pays. Si l’on se fie à l’inscription haut placée sur la cabine, c’est « Jack Bauer » qui est au volant. En réalité, Maitre Niankoye, éreinté par le trajet difficile et brulé par le soleil de Faranah puise dans ces dernières réserves d’énergie pour livrer sa cargaison fragile au marché forestier de Tanéné à Conakry.

      « Bonne chance », en lettres capitales, barre tout le flanc gauche d’un «School bus surchargé en route pour Kankan. De la chance, en a vraiment besoin la centaine de passagers de cet ancien autocar américain dans lequel pétaient, jadis sur les routes du Mississipi, une trentaine d’écoliers américains. On continue, certes, à péter dans cette épave d’autocar sur les virages en épingle de Yombokouré, mais pour d’autres raisons…

      De l’Amérique, nous vient également Madonna, en posture lascive sur un poster qui colonise les taxis. On se croirait à la veille d’un concert de la superstar à Conakry, ville qu’elle ne saurait même pas géolocaliser sur son Google Earth.

      Ce sont des banderoles en percale, tendues entre deux poteaux, qui annoncent les concerts à Conakry. Fantaisies d’écritures et fautes d’orthographe se disputent la vedette sur ces bouts de tissus qui inondent les axes routiers. Les enseignes d’échoppes de quartier, d’atelier de couture et de coiffure, sont le porte-étendard de ce massacre organisé de l’orthographe. Ici, la prononciation d’un mot passe avant le respect des règles d’écriture. Qu’importe ! « Pouleh rauty » ou « poulet rôti » ne change pas la saveur de votre plat dans ce resto de banlieue.

      Conakry est dépourvue de graffitis, excepté quelques inscriptions murales que l’on rencontre par exemple au quartier Wanindara, inspirées par le lointain hip-hop américain des années 90 que de petits délinquants tentent de perpétuer. A Kaloum, au centre administratif, les murs témoignent de la guerre des factions de jeunes manipulés par les politiques locaux.

      Désignée capitale mondiale du livre en 2017, Conakry offre d’ores et déjà une littérature murale riche et diversifiée. Un livre dont chaque coin de rue est une page ouverte. Il suffit de lever le regard pour en saisir le sens. Bonne lecture et bonne année 2016.

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      Article : Conakry, le règne de la télécommande
      société
      1
      13 décembre 2015

      Conakry, le règne de la télécommande

      Photo: www.ssofast.com
      Photo: www.ssofast.com

      Kaléta commence à mettre toute la lumière sur la vie des foyers à Conakry bercés par une obscurité permanente, 57 ans après l’indépendance de la Guinée. Depuis le lancement, fin septembre 2015, de ce barrage hydroélectrique de 240 MW qui fournit jusqu’ici régulièrement du courant électrique à la capitale et à quelques villes de province, les habitants de Conakry émergent progressivement de l’ignorantisme sous lequel ils étaient ensevelis.

      Mais ils n’échappent pas à la règle de l’éblouissement, effet d’optique qui frappe celui qui passe de l’ombre à la lumière éclatante. Les Conakrykas usent et abusent du courant, aveuglés par la découverte presque inattendue de cette denrée rare. Plusieurs fois désabusés, ils sont sans doute sceptiques sur la pérennité de ce service social de base dont la fourniture a toujours été un enjeu électoral majeur.

      Alors on en « profite ». Et pas qu’un peu ! En attendant la pose systématique des compteurs électriques dans les foyers pour l’établissement correct des factures de consommation, c’est la course à l’armement… électroménager. Fers à repasser énergivores, réfrigérateurs grabataires, thermoplongeurs antédiluviens, four à micro-ondes, climatiseurs, téléviseurs, cuiseurs…Conakry est littéralement noyée sous un déluge de matériels électriques souvent de seconde main importés de l’Occident.

      Au grand dam de la sécurité des consommateurs et de la protection de l’environnement. A ce rythme, il faut espérer que la COP22 sera organisée à Conakry pour sauver ce qui aura survécu… En attendant, la petite classe moyenne émergente entend bien profiter de l’opportunité pour améliorer sa qualité de vie. Grand, risque d’être le désenchantement quand le courant sera facturé à sa juste valeur.

      Sans surprise, la télé occupe la tête de la longue liste d’appareils électriques achetés. Elle trône au salon dans pratiquement tous les foyers urbains électrifiés. Au sein des jeunes couples, les femmes la désirent aussi plate et large que possible. La longueur de la diagonale de l’écran est un étalon de mesure de leur satisfaction. C’est à croire que, physiquement, elles s’identifient à cet objet devenu leur second miroir après Facebook.

      Passé ce détail esthétique, l’inévitable débat sur les programmes à suivre s’impose. Et c’est là que, toujours au sein des couples, la télécommande prend toute son importance. Discrète habituellement, elle savoure sa revanche suscitant l’envie de chacun au point de semer la zizanie entre mari et femme. Pour mieux régner, la télécommande divise les chaînes de télé en nombre, mais surtout en genre. Jeux et sports pour le mâle, musique et feuilletons pour la femelle.

      Et c’est parti pour la « guerre » alimentée par les distributeurs d’images satellites qui jettent régulièrement de l’huile sur le feu en proposant de nouvelles chaines dans chaque catégorie.

      Si pour les hommes le sport se résume aux championnats de football européens et les compétitions internationales, pour les femmes, en revanche, les sujets sont plus complexes et variés.

      La passion de nos femmes pour les feuilletons est un véritable sujet d’étude sociologique. Elles sont insatiables de ces histoires d’amour à l’eau de rose déclinées en un chapelet interminable d’épisodes quasi-identiques. Et c’est là que ça devient vraiment intriguant, puisque voir un seul de ces feuillons, c’est voir tous les autres.

      Le scénario est généralement construit autour de l’amour, la gloire, la beauté, l’argent, le mensonges et les trahisons. Des thèmes que les scénaristes, selon leur imagination, mixent et remixent à l’envie en y ajoutant quelques ingrédients : de l’eau et du sable fin saupoudrés de musique exotique.

      C’est au milieu des années 1990, selon mes souvenirs, que notre télévision nationale a commencé à diffuser ces télénovelas à travers le feuilleton Mari Mar. Par la suite, on a vu fleurir dans les rues de Conakry des Rosa et des Léopoldina étrangement fagotées. Le Cercle de feu et Femmes de sable allaient enfoncer le clou. Depuis l’arrivée des bouquets, c’est le déferlement : Amour Océan, Cœur Brisé, Vaidehi, Main Teri, Paloma, La Patrona, …

      En dehors du plaisir de voir la fin du film, qui se termine toujours par  un « happy end », l’apport culturel de ces télénovelas est fort discutable. Y en a qui pensent qu’elles contribuent tout simplement à abêtir davantage celles qui en sont accros. Au regard de la culture générale de nos braves étudiantes, je suis tenté d’y croire. Inversement, nul ne peut affirmer que le foot à la télé favorise l’émergence des Senghors dans les universités…

      En tout cas, ni la bizarrerie des titres, ni les réalités socio-culturelles éloignées, ni le doublage de piètre qualité de ces feuilletons latino-américains ou indiens ne constituent un frein pour leur succès fulgurant chez nous. Au contraire.

      Les fournisseurs d’images sont ceux qui ont le mieux compris ce phénomène, multipliant l’offre sur les bouquets satellitaires. En mars dernier, le groupe THEMA a sauté le pas pour créer carrément la chaine bien nommée NOVELAS TV sur le bouquet CanalSat. Désormais, dans les foyers, il faut engager des pourparlers même pour voir le Journal sur la chaine nationale ! On ne respire plus.

      Quand la tension monte gravement dans les couples pour le contrôle de la télécommande, certaines femmes n’hésitent pas à proposer à leur mari d’acheter un second téléviseur. Quitte à chasser définitivement le très peu de quiétude qu’on trouve dans un appartement à Conakry ou à saler un peu plus la facture d’électricité et d’abonnement aux chaines de télé. Aux frais du Monsieur, bien sûr.

      Mais ne dit-on pas que ce que femme veut, Dieu le Veut ? Reste à savoir si l’inverse est valable.

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      Article : Conakry by night, version 2015
      Fêtes
      5
      8 novembre 2015

      Conakry by night, version 2015

      Au Crisber - Photo: Alimou Sow
      Au Crisber – Photo: Alimou Sow

      Conakry est ineffable. C’est une ville bouillonnante qui vit à 100 à l’heure. Agressive et stressante le jour, elle est calme et apaisante la nuit en cette fin d’année 2015. Quand le soleil incandescent décline derrière l’archipel des îles de Loos, la cité vous rend au centuple ce qu’elle vous aura pris la journée. Une équité que les noctambules ont bien comprise. Je suis un des leurs ce samedi soir-là.

      J’ai craqué pour une sortie en boîte de nuit organisée par un ami de Facebook à l’humour vif et tranchant. Une première depuis quasiment mes années d’adolescent timide que les potes du quartier étaient obligés de traîner pour aller danser à l’occasion de grandes fêtes de fin d’année.

      J’ai toujours préféré potasser un bouquin de 500 pages que d’aller me défoncer les tympans et les chevilles dans une discothèque surchauffée de Conakry. J’abhorre danser. L’idée de serrer une fille sur un air de zouk était pour moi la pire torture psychologique qui soit. Peur de danser faux, peur de piétiner ma cavalière ou de lui faire sentir la dureté de mes tibias d’enfant berger des montagnes…

      Du temps a passé. J’ai également plus d’assurance avec ma cavalière de ce soir (ma femme).

      Au volant, je suis bluffé par le contraste de la circulation entre le jour et la nuit. Les voies de circulation de la capitale, éternels parkings géants et marchés le jour, retrouvent leur raison d’être la nuit. Tout est dégagé, faisant apparaitre la largeur réelle des routes, inimaginable aux heures de pointe. A 2H du mat’, on peut se taper un tour complet de la capitale et sa banlieue tentaculaire en moins d’une heure d’horloge !

      Routes dégagées mais aussi éclairées. Du moins, les deux principales qui desservent la presqu’île de Kaloum : les autoroutes Fidel Castro et Leprince, tracées en parallèle  et reliées entre elles par des « transversales » à la manière d’un chemin de fer.

      Les noctambules, excités par la fluidité de la circulation, écrasent le champignon sous la lumière blafarde des centaines de lampadaires solaires plantés en rang d’oignons entre les deux voies autoroutières. Le malheur est vite arrivé. Un motard a été écrasé à Koloma, près du siège de la télévision nationale. Preuve, s’il en était besoin, que les nombreux check-points installés aux principaux ronds-points ont d’autres objectifs que de décourager les chauffards roulant à tombeau ouvert.

      Au niveau de l’un de ces « barrages routiers », au quartier « Cité Enco5 », deux garçons sont soumis à une séance humiliante de pompes verticales devant leurs petites amies qui en rigolent (ah les meufs !). De jeunes gens paisibles, sans moyens de déplacement, qui profitaient simplement de la fin des vacances pour s’amuser . Les autoroutes sont peut-être éclairées, mais les idées sont encore obscurantistes dans ce pays…

      Malgré l’heure tardive, les abords des routes sont animés. Le courant du barrage de Kaléta fait monter la tension tous les soirs chez les fêtards des cabarets. Dans presque chaque quartier, des spectacles folkloriques (pôodha) très populaires réunissent des nostalgiques qui noient leurs soucis dans le Skool et la cigarette, esquissant des pas de danse mal assurés. Rendez-vous incontournables des ouvriers, manœuvres, petits commerçants et femmes divorcées.

      Pour danser, les étudiants et les diplômés, eux, préfèrent les discothèques. Les plus huppées sont concentrées le long des deux corniches, nord et sud, de Conakry dans la proche banlieue de la capitale, notamment dans les quartiers de Kipé, Taouyah et La Camayenne.

      Mon ami « organise » au « Crisber », à Kipé, l’une des discothèques les plus populaires de Conakry. La seule fois que j’ai dansé ici, ça s’appelait le « Climax ». C’est peu de dire que ça a changé depuis. Côté décor et installations, tout a été revu et corrigé : pistes de danses modernes, reposoirs propres, éclairages au top, espaces mieux insonorisés et surtout bien climatisés. Il faut vraiment épuiser un album entier de techno ou du reggae pour sentir ses aisselles humides. La sécurité est également omniprésente. Des videurs trainant des quintaux de muscles veillent au grain.

      La seule fausse note (partagé avec d’autres lieux), c’est l’absence d’aire de parking. Les véhicules s’alignent le long de la route générant un petit bouchon alentour. Je doute également que la boîte soit équipée des issues de secours et de plan d’évacuation en cas de sinistre.

      Pour l’animation, je suis un peu déçu. Trop de Dancehall et de hip-hop américains ultra saturés (Dj Quick, Patoranking, Wandecoal, etc.). J’ai certes eu du Korede Bello avec son captivant « Godwin » mais pas assez de guinéen. Enfin, j’étais choqué de voir les petites filles, à l’accoutrement aux effets Viagra, se déchaîner sur le très vulgaire clip « Coller la petite » du  Camerounais Franko (Kinguè Franck Junior).

      La nuit s’étire. Les articulations sont fatiguées, les ventres vides. La faim étant la plus fidèle compagne des sortants de soirée de danse, des vendeurs de viande sont stratégiquement installés à l’affût aux alentours du rond-point « Centre Emetteur » à Kipé. Chèvre et poulet grillés au menu.

      Des noctambules affamés, assis à califourchon sur des bancs en bois, démembrent impitoyablement des poulets braisés sous les néons du centre Plazza Diamon situé de l’autre côté de la route. Ça dévisse bruyamment entre deux bouchées de chèvre ou de poulet entrecoupées de longues lampées de breuvage. Il est déjà 3 heures du matin. Personne ne semble se soucier de l’heure.

      Conakry est définitivement une capitale qui ne dort jamais.

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      Article : Leur histoire d’amour née sur Facebook se termine au village au premier rendez-vous !
      Nouvelles Technologies
      4
      16 août 2015

      Leur histoire d’amour née sur Facebook se termine au village au premier rendez-vous !

      crédit photo: lecontrarien.com
      crédit photo: lecontrarien.com

      C’est l’épilogue d’une histoire d’amour tout droit sortie d’un roman de Yasmina Khadra qui s’est joué, jeudi 13 août 2015, à Brouwal Sounki, un village de Télimélé perché sur les contreforts du Fouta Djallon. Sur place, elle fait la « Une » des potins des chaumières, amusant les jeunes gens, horripilant les vieilles personnes qui découvrent Facebook pour la première fois. Hélas, sous le plus mauvais jour du réseau social de Mark Zuckerberg.

      Tout, a priori, séparait A.B et F.D, la vingtaine révolue. D’abord la distance, l’un vivant à Abidjan en Côte d’Ivoire, l’autre à Ziguinchor, dans la région de la Casamance au sud du Sénégal. Ensuite la disponibilité, tous deux étant mariés, chacun de son côté.

      Il n’y a que la magie de Facebook qui soit capable de rapprocher de tels extrêmes au point de favoriser l’éclosion d’une incroyable histoire d’amour virtuelle entre deux jeunes gens dont la naïveté et l’imprudence feront la honte.

      A.B est ce qu’on appelle un aventurier. Le jeune homme affable a roulé sa bosse dans plusieurs pays ouest-africains à la recherche d’un travail rémunérateur. Il a même tenté l’aventure périlleuse en Angola avant de revenir poser ses valises à Abidjan. Marié, sa femme vit au village, en Guinée, aux côtés de ses parents.

      F.D quant à elle est femme au foyer. Calme et effacée. Elle est mariée à un commerçant guinéen établi depuis plus d’une décennie à Ziguinchor en Casamance où leurs affaires prospèrent. Elle élève paisiblement ses deux enfants aux côtés de son mari à qui elle donne un coup de main à l’épicerie familiale de temps en temps.

      C’est cette harmonie que Facebook a à jamais bouleversée.

      A.B et F.D se sont donc rencontrés sur ce réseau social il y a de cela plusieurs mois. Ils se lient d’amitié qui glisse progressivement en amour, consolidé par des sulfureux messages privés qu’ils s’échangent dans l’intimité de l’application Messenger.

      Personne dans leur entourage n’a la moindre idée de ce que fricotent les deux amants virtuels. Jusqu’à ce que disparaît miraculeusement F.D, début août, laissant derrière elle ses deux enfants et une énorme angoisse à son mari et à ses parents. On la cherche partout à Ziguinchor. Introuvable. Une alerte disparition est lancée, les forces de sécurité sénégalaises sont mises au courant.

      Deux jours après sa disparition, la famille de la jeune femme retrouve un téléphone de F.D sur lequel elle avait oublié de se déconnecter de son compte Facebook toujours actif. Très vite, l’application livre les secrets de sa fugue. A la stupéfaction générale, on découvre que derrière la timidité feinte de la jeune mère se cachait une malice très discrète. Elle est amoureuse d’un homme vivant à des milliers de kilomètres de là qu’elle n’a jamais rencontré dans la vraie vie. Ils se sont donné rendez-vous en Guinée !

      Les messages privés révèlent la véritable identité de A.B qu’il avait réussi à dissimuler en utilisant un pseudonyme sur son compte Facebook. Le lieu de leur rendez-vous, l’itinéraire que F. D devait suivre pour y arriver, les complicités… tout avait été orchestré via Facebook. Pire, ils avaient un projet de taille :  se marier !

      Coups de fil en Guinée pour prévenir les autorités et les parents. Les informations sont rapidement recoupées. A.B a effectivement quitté Abidjan. Il est repéré à Conakry, puis dans son village natal où il arrive le lendemain.

      Il n’a pas le temps de déposer son sac. Une unité de la gendarmerie de Brouwal alertée, fait irruption dans son village et le met immédiatement aux arrêts. Transféré à la sous-préfecture, il nie dans un premier temps être à l’origine de la disparition de F.D. Mais ses échanges Facebook le trahissent. Il finit par tout avouer révélant par la même occasion que la femme disparue se trouve quelque part à Télimélé ville où ils ont passé la nuit ensemble la veille.

      Elle est retrouvée par les gendarmes qui la conduisent aux côtés de son amant pour s’expliquer.

      Voici l’explication : le jeune homme était spécialement revenu au village, qu’il a quitté depuis plus de trois ans, pour trouver un prétexte de divorce avec son épouse légitime afin d’épouser la femme du commerçant. Cette dernière s’était financièrement préparée à cette issue en dérobant une importante somme d’argent à son mari avant de prendre la tangente.

      Comme souvent au village, l’affaire a été réglée à l’amiable et comme toujours à la grande satisfaction des forces de sécurité qui ne se déplacent jamais pour rien.

      Cette histoire est révélatrice du danger des réseaux sociaux quand ils sont utilisés à mauvais escient. Malheureusement, elle est loin d’être un cas isolé.

      On ne dira jamais assez qu’il faut se méfier des inconnus et de l’apparence, surtout sur Internet.

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      Article : Ces catastrophes qui ont ôté le cache-sexe de Conakry
      Environnement
      7
      29 juillet 2015

      Ces catastrophes qui ont ôté le cache-sexe de Conakry

      Une rue de Conakry sous la pluie - crédit photo: Alimou sow
      Une rue de Conakry sous la pluie – crédit photo: Alimou sow

      La scène, filmée avec un téléphone portable, est digne d’un documentaire de National Geographic Channel tourné à l’archipel des Bissagos. On y voit  trois personnes juchées sur l’épave d’un congélateur traversant les deux voies de l’autoroute Fidel Castro de Conakry à la nage ! Cela s’est passé au quartier Bonfi où le temps s’est arrêté ce samedi 25 juillet 2015 en fin d’après-midi.

      De mémoire d’homme, rarement la capitale guinéenne n’a été autant lessivée que pendant les 10 derniers jours de ce mois de juillet 2015. Une semaine, quasiment sans interruption, les vannes du ciel sont grandes ouvertes déversant des mètres cubes d’eau sur chaque millimètre carré du sol de Conakry.

      Puis arriva ce qui devait arriver.

      Des catastrophes en cascade : inondations, éboulements, accidents de circulation. Au moins quatre personnes ont perdu la vie depuis le début du déluge, selon les médias.

      Sur les principaux axes routiers, les caniveaux ont recraché sur la chaussée tout ce qu’ils avaient dans le ventre offrant un spectacle dégueu.

      Dans les anciens quartiers de Conakry, comme celui au nom évocateur de Tombo, les vieilles maisons ont l’air d’être bâties sur des pilotis, certaines n’étant accessibles qu’en radeau de fortune de type vieux congélateur. Plusieurs citoyens sont courbaturés à force d’évacuer les eaux pour déblayer leur … Tombo.

      Les nouveaux quartiers, en haute banlieue, n’ont pas été épargnés. Evidemment pas dans les mêmes proportions que pour « la vieille ville ». Les intempéries savent, elles aussi, distinguer le riche du pauvre.

      Décidément, 2015 est un millésime poisseux pour les habitants de Conakry déjà éprouvés par des décennies de malaria et près de deux ans d’Ebola.

      Dans la nuit du 13 au 14 juin dernier, une tornade accompagnée des vents violents avait balayé la ville provoquant des dégâts matériels et humains considérables. Au moins un mort et des centaines de maisons détruites ou endommagées. De ces dégâts, l’opinion publique n’avait choisi de retenir qu’une histoire à dormir debout selon laquelle un manguier arraché par le vent se serait replanté tout seul dans un quartier de la capitale ! Œuvre signée des épiciers de la rumeur.

      Cette banalisation des drames humains est caractéristique de Conakry, cité ineffable. Elle est révélatrice de la haute idée qu’ont les habitants et leurs dirigeants de la vie humaine. Ici tout est banal, puisque tout est banalisé.

      Le citoyen qui balance des ordures dans les caniveaux destinés à drainer les eaux de ruissellement, c’est une banalité.

      Les commis de l’Etat qui vendent des parcelles à des citoyens dans des zones réservées, le même Etat qui revient casser les constructions, c’est anodin.

      Les femmes qui mangent et pataugent dans les détritus des marchés à longueur de journée, c’est banal.

      Le taxi et ses passagers qui se tuent en s’encastrant dans la carcasse d’un camion-remorque garé au beau milieu de la chaussée, c’est un non-événement.

      Les jeunes qui barrent la route pour jouer au foot et qui cassent les pare-brise des conducteurs, on s’en fout c’est banal.

      Les militaires qui fendent les files de véhicules, roulant à tombeau ouvert dans les embouteillages, c’est vicinal.

      Les petits délinquants de Madina qui font pleurer des femmes tous les jours en volant leur téléphone portable au nez et à la barbe des forces de sécurité, c’est rien.

      Bref, en attendant d’être la capitale mondiale du livre en 2017, Conakry est la capitale de l’insouciance et du laisser-aller. Chacun fait ce qu’il veut en s’asseyant sur le droit des autres.

      Le résultat est une anarchie à ciel ouvert qui règne sur une presqu’île de près de 50 km de long. Et quand les éléments de la nature se déchaînent comme cette fois, ils balaient tout sur leur passage ôtant par la même occasion le cache-sexe de notre invulnérabilité supposée.

      A bien observer Conakry, la réalité saute aux yeux. C’est une ville qui a chassé un village. On le sent à travers la flore essentiellement constituée d’arbres fruitiers, plantés non pas pour embellir une quelconque rue, mais pour répondre à un besoin primaire : calmer la faim. Ce sont ces manguiers, avocatiers, et palmiers qui ont causé les plus gros dégâts dans la nuit du 13 au 14 juin dernier.

      La « ville-village » continue pourtant de s’étendre sauvagement se livrant chaque jour à la férocité de la force destructrice de la nature.

      Bien que la Guinée tout entière soit exposée constamment à des vents violents, à des inondations et à des séismes, le pays ne dispose d’aucun moyen sérieux pour prévenir ces catastrophes naturelles. Encore moins de plan d’évacuation de la ville de Conakry, cette bande de « Gaza » guinéenne à la merci des intempéries.

      Notre plan Vigipirate ? Euh… Vigi quoi ? Et pour l’organisation des secours, revenez le 14 février pour en parler.

      Samedi, 20 juillet 2013 (encore en juillet!) un séisme a frappé une bonne partie du pays et notamment la capitale Conakry. Il a fallu attendre plusieurs jours pour qu’un responsable de la Direction nationale de la géologie prenne la parole pour annoncer fièrement que selon ses collègues du Centre sismique de Mbour, au Sénégal, la magnitude du tremblement de terre était de 2,5 sur l’échelle de Richter (sic). Quelle prouesse !

      Cette fois, c’est après une semaine de déluge que la Direction nationale de la météorologie (DNM) s’est fendue d’un communiqué pour nous dire quelle quantité de pluie nous avons prise dans la gueule durant les sept derniers jours. Je rappelle également qu’après la violente tornade de juin, ils ont eu la gentillesse de nous révéler la vitesse du vent qui nous a secoués : 90 km/h ! Merci chef.

      A la décharge de ces services, il faut reconnaître qu’ils végètent dans un dénuement complet. Matériels obsolètes, vieillissement du personnel, manque d’investissement et de motivation. La DNM ne dispose même pas d’un  site web ou d’une page Facebook (c’est gratuit non ?) pour publier ses communiqués post-dégâts !

      Avez-vous croisé un élève guinéen qui aspire à devenir un Texan Camara, euh… pardon, un météorologue ? Ou bien un sismologue ? Ou encore un océanographe ? Tout le monde veut être journaliste, juriste, informaticien, banquier, minier, diamantaire, argentier, président, etc. Et on en est là.

      En tout état de cause si vous attendez le bulletin météo d’avant le journal TV pour décider ou non de prendre votre parapluie à Conakry, c’est que vous êtes vraiment, mais alors vraiment mal barré !

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      Article : Au cœur de la forêt guinéenne, les trésors du Ziama
      Découverte
      6
      18 juin 2015

      Au cœur de la forêt guinéenne, les trésors du Ziama

      Vue du massif de Ziama à Sérédou - crédit photo: Alimou Sow
      Vue du massif de Ziama à Sérédou – crédit photo: Alimou Sow

      Dans ma tête, le massif du Ziama a toujours été cette tache baveuse que nous montrait notre Instituteur, Monsieur Diallo, sur une carte de la Guinée quelque part dans le sud du pays près d’une encoignure qui évoque le bec du perroquet. Vingt-et-un ans plus tard, j’ai la chance de toucher le Ziama du doigt, d’écouter ses multiples gazouillis, d’humer ses mille et une senteurs, de sentir sa fraicheur équatoriale.

      Mais le confort est au bout de l’effort. Pour arriver au Ziama à partir de Guéckédou, le voyageur doit affronter le fameux tronçon de « l’enfer » Guéckédou – Kondébadou. Trente-cinq kilomètres parsemés de nids de poule, de crevasses et de véritables cratères, par endroits, dans lesquels pataugent des poids lourds surchargés au moteur fatigué. Des morceaux de goudron s’accrochant désespérément au sol argileux rappellent que la route était bitumée jadis.

      Le soulagement s’appelle Kondébadou (Macenta) où, au milieu de nulle part, surgit un ruban de bitume en parfait état qui serpente à travers la forêt et illumine les visages d’un sourire presque involontaire. L’habitat est très dispersé à travers un relief vallonné. Des hameaux défilent à intervalle irrégulier d’un côté et de l’autre de la route ; puis apparait la ville de Macenta encastrée dans une cuvette cernée de montagnes granitiques.

      A 30 km de Macenta, changement de décor. Les clairières et les montagnes chauves font place à une forêt dense et humide. C’est le massif du Ziama avec son micro-climat exceptionnel. Des arbres au tronc démesuré s’élancent dans le ciel formant une canopée céleste. La route franchit un col donnant accès à la cuvette de Sérédou située à 37 bornes de Macenta-centre. Nous sommes au cœur du Ziama.

      Le Ziama est un massif montagneux de la dorsale guinéenne, mais c’est aussi et surtout une réserve forestière de près de 120.000 hectares à cheval entre la Guinée et le Libéria voisin. Erigé en forêt classée depuis 1942, le site compterait plus de 1.300 espèces végétales. Un havre de paix pour pas moins de 547 espèces animales, dont 22 espèces protégées par la convention CITES pour le respect de laquelle la Guinée est un mauvais élève. Selon un vieux recensement daté de 2004, on dénombrait 214 éléphant, y compris le fameux éléphant nain d’Afrique. Ziama est classé patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1980.

      Sa biosphère est si attractive que l’ancien gouverneur de l’Afrique occidentale française (AOF), qui avait pour résidence Dakar, venait se la couler douce ici-même pendant ses vacances. Il s’était tapé une coquette cabane dans la montagne, à Quinadou, à 15 km de Sérédou-centre. La maison est aujourd’hui en ruines, au grand dam du maire de la commune rurale.

      Grâce à la fameuses forêt de quinquinas du Ziama, la Guinée disposait de l’un des premiers laboratoires de production de la quinine en Afrique. Les quinquinas sont toujours là, mais le labo lui est mort enterré. Un sort identique a frappé la célèbre scierie de Sérédou aux immenses hangars qui meurent à petit feu, rongés par la rouille sous le regard attendrissant du massif montagneux.

      Le défi de la préservation des trésors de biodiversité du Ziama s’est toujours posé avec acuité. La majorité de la population riveraine dépend de la forêt d’où elle tire l’essentiel de sa nourriture à travers l’agriculture, la chasse et l’exploitation du bois. Les métiers les plus courants à Sérédou ? La menuiserie et le braconnage. Et si l’on lorgne de plus près, on ne sera pas surpris de découvrir un petit trafic d’animaux protégés.

      Depuis près d’un demi-siècle, différents projets ont été mis en œuvre pour préserver les richesses fauniques et floristiques de la réserve, avec plus ou moins de succès. Pour décourager les braconniers et les trafiquants des produits ligneux et animaliers, une unité d’une centaine de gardes forestiers non armés veille au grain. Autant dire, une goutte d’eau dans l’océan de verdure du Ziama.

      Pour préserver toutes ses richesses et espérer en tirer profit à travers l’éco-tourisme par exemple, il faut plus que des mesures coercitives. Il est impératif de développer des activités génératrices de revenus en faveur des riverains afin qu’ils fassent la substitution.

      Cela pourrait passer par le café car le terrain est très propice. Quelques producteurs locaux, réunis en coopératives, essaient de perpétuer une culture domestique du caféier sur flanc de montagne. Leur combat consiste également à labéliser le café du Ziama aux saveurs exceptionnelles selon les connaisseurs.

      En tout cas, siroter une tasse de café du Ziama dans la maison réhabilitée de l’ancien gouverneur, à Quinadou, est un rêve que je caresse avec tendresse…

       

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      Article : Cinq choses que les célibataires (hommes) devraient savoir sur le mariage en milieu peul
      société
      14
      26 avril 2015

      Cinq choses que les célibataires (hommes) devraient savoir sur le mariage en milieu peul

      couple marié, la fille en habit traditionnel
      Couple marié, la fille en habit traditionnel – crédit photo: Cellou

      Une idée, sans doute reçue, veut qu’en Guinée la proportion de filles célibataires soit nettement supérieure à celle des hommes du même état civil. Aucune étude n’existe pour étayer cette affirmation, ceux qui la colportent se fondant en général sur les données de quelques foyers où le nombre de filles domine celui des garçons. Toujours est-il que des contingents entiers de célibataires hommes sont convaincus qu’il existe tellement de princesses au cœur à prendre qu’ils auront l’embarras du choix le jour où ils se décideront de convoler en noces et qu’avec un peu de chance ce sont ces princesses qui viendront demander carrément leur main !

      Seulement, il y a cet impitoyable proverbe peul qui enseigne que « Mö yawi kouthioun ö souwâki » que l’on pourrait traduire littéralement par « celui qui minimise un morceau de viande n’est pas circoncis ». Autrement dit, sous-estimer un défi que l’on n’a pas affronté relève de l’imprudence ou de l’ignorance. Et, en dépit des apparences, le défi du mariage en milieu peul (de Guinée) n’est pas une mince affaire… Preuve par cinq.

      1. Le choix de l’épouse : En fait de choix, c’est à une véritable quête que le mâle sera soumis. Vous ne le saurez que quand vous y serez confronté. On a beau supputer que les filles célibataires sont à ramasser à la pelle, parvenir à dégoter l’une d’elles peut se révéler un réel parcours du combattant. Trois raisons à cela : la religion (l’islam) qui interdit d’avoir une relation avec sa future épouse avant le mariage, la famille qui détient le vrai pouvoir décisionnel et l’endogamie quasiment érigée en règle. A la fac, ton cœur d’étudiant célibataire s’emballe pour une belle fille que tu as vu faire mijoter des dizaines de marmites de mangues. Tu en parles au « vieux », qui en parle à son frère et voilà ton oncle qui te soupçonne de velléité d’épouser ton ex-copine et t’impose l’une de ses boutonneuses filles. Si tu n’as pas de charisme, c’est-à-dire pauvre comme un étudiant de province, l’affaire est pliée. Si au contraire, tu as voix au chapitre, on passe par les liens familiaux pour te flanquer une pression qui t’oblige à accepter « Binta », ta cousine, comme femme. Les parents font les démarches nécessaires et on passe à l’étape suivante.

       

      1. Le mariage religieux : C’est l’affaire des sages. Le mariage religieux est généralement scellé à la mosquée entre les deux familles devant les notables. Il précède obligatoirement celui civil. La présence des mariés n’est pas requise, celle de la fille étant même proscrite dans certains cas. La procédure, d’une durée variable, est un mélange de questions-réponses ponctuées d’une litanie de bénédictions extraites du Coran. Des enveloppes font la navette. Le minimum de la dot tourne autour de 500.000 GNF, sans maximum. Elle peut grimper suivant la richesse de l’homme ou la beauté de la femme ! Presque toutes les femmes peules étant belles, 500.000 GNF c’est prix de l’eau. La dot est accompagnée d’un lot de noix de cola au nombre impair (généralement 101), artistiquement emballé dans de larges feuilles sauvages nouées à l’aide des ficelles artisanales, le tout formant une longue tige verticale qui évoque un phallus en érection gorgé de Viagra. Tout un symbole.

       

      1. La cérémonie traditionnelle : Le rite traditionnel du mariage chez les Peuls a fortement subi l’influence de la modernité et s’est enrichi d’autres cultures. Il n’est pas homogène et peut différer d’un clan à un autre, voire d’une famille à une autre. On retrouve cependant quelques traits communs dans la couleur : « Diomba » (la mariée) est d’abord drapée dans une toile blanche non cousue qu’elle remplace ensuite par un joli complet de couleur rouge. Pour accentuer la beauté de ce complet, la modernité veut qu’il soit recouvert d’un tapis de billets de banque neufs, tout comme le parapluie, également rouge, que tient la mariée. Comptez entre 200.000 et 500.000 GNF pour cette opération esthétique. A ce niveau, je me permets de commettre un délit d’initié : mettez le montant le plus élevé et faites en sorte que le complet soit cousu le maximum de gros billets. Achetez une lame et attendez le lendemain de la cérémonie, où vous serez plus fauché qu’un rat d’église, pour vous attaquer sans scrupule au complet de Mme. Ça s’appelle du « donnant donnant ».

       

      1. La cérémonie civile : Elle représente tout ce qu’il y a de brillant, de bruyant et d’abondant. Un mariage civil en milieu peul, c’est d’abord de la bectance à foison. On ne lésine pas sur les moyens pour nourrir les invités dont on ne connaît jamais le nombre exact. Ce sont des mètres cubes de fonio et de Latsri-et-Kossan, les deux plats traditionnels, qui sont engloutis en quelques heures. Du début à la fin, il faut que les gens mangent, boivent et s’amusent. Pour la brillance, la mariée est au centre du soleil. Avant de se présenter devant l’officier de l’état civil pour la signature de l’acte du mariage, votre princesse passe de longues heures dans un salon de coiffure où elle doit subir une opération chimique esthétique qui la transformera de fond en comble. Le saupoudrage peut la rendre méconnaissable (parfois de beauté, parfois de quelque chose d’indéfinissable). Puis, la miss factice est escortée dans un vacarme assourdissant de motos et de voitures. Destination, la « Réception ». Avant, au village, les femmes se réunissaient autour de « Diomba » et chantaient de belles mélodies traditionnelles. Ça, c’était avant. Maintenant, ce sont des artistes, facturant leur prestation à prix d’or, qui prennent possession de l’arène. Ils enchaînent les dédicaces et dépouillent tout le monde jusqu’à épuisement.

       

      1. Le budget : Combien coûte un mariage chez nous ? Nul ne le sait avec précision. Tu fais l’intello, tu consultes et crées un tableur Excel sophistiqué pour inscrire toutes les lignes des dépenses. Le jour du mariage, on te sort des charges insoupçonnables qui rendent totalement caduques tes prévisions. Entre les entrées, faites des contributions des proches, parents et amis, et les sorties incontrôlées qui coulent de tes poches, difficile d’appliquer une quelconque opération comptable. De toute façon pour espérer s’en sortir, débrouillez-vous pour que le montant de la ligne des imprévus soit égal ou supérieur au total du budget. Si après tout ça tu râles, on a une formule couperet pour te recadrer : « Fâaladho djwö bhé haylaymbha». Son équivalent en français serait « l’homme en quête d’épouse doit mouiller le maillot ». En Poular, le sens de l’expression est un peu plus ambigu et pourrait signifier : « L’homme en quête d’épouse doit secouer (sous-entendu le pantalon, ou bien les bijoux que cache celui-ci) ». Vous voilà avertis, chers célibataires.

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      Article : Conakry, côté pile
      Découverte
      9
      23 février 2015

      Conakry, côté pile

      Une vue au large de Room - crédit photo: Alimou Sow
      Une vue au large de Room – crédit photo: Alimou Sow

      Dans le palmarès des villes propres où il fait bon vivre, Conakry est en queue de peloton. Les habitants de la capitale guinéenne sont sempiternellement pressés, stressés et cassants. A bien regarder leur habitat sur une carte, on comprend leur situation : ce n’est pas facile de vivre dans un cigare !

      Plus de deux millions de personnes sont entassées sur une bande de terre en forme de cigare géant qui plonge dans l’océan sur 40 km de long, avec en moyenne 8 km de large. Deux routes parallèles servent de voies de circulation qu’empruntent chaque jour des dizaines de milliers de véhicules presque toujours au même moment et dans le même sens. Même au cinéma on ne saurait récréer un capharnaüm plus abouti.

      La promiscuité, les frustrations, la galère et les rancœurs, entretenues par des discours politiques ravageurs font que, durant les 20 dernières années, la cité est devenue un volcan en ébullition où la moindre humeur s’exprime dans une violente éruption : les ordures quittent, un temps, les fossés pour la chaussée, des pare-brises volent en éclats avant que les écœurés n’hument du lacrymogène pour se calmer.

      Pour échapper à ce chaudron incandescent à la quête d’un bol d’air frais, il faut gagner les terres de l’intérieur du pays ou prendre le large. Mon choix porte sur la seconde option.

      Mais 20 ans de vie à Conakry n’ont pas effacé mes souvenirs d’enfance de petit berger peul sur les hauts plateaux de la partie occidentale de la région du Fouta Djallon. Je sais faire le Tarzan en balançant au bout d’une liane entre deux rochers, mais pas accrocher un appât sur une ligne pour aller à la pêche. Bref, la phobie de l’océan a fini de me convaincre que je pourrais me noyer dans un verre d’eau.

      Pourtant, je me jette à corps perdu pour l’archipel des îles de Loos. Le 14 février est en effet une occasion plus que… romantique pour rendre visite à mes insulaires compatriotes ou sombrer dans l’Atlantique façon Jacques Dawson dans Titanic.

      Notre Titanic à nous sera une pirogue, longue d’une quinzaine de mètres, à l’arrière de laquelle est flanqué un moteur Yamaha aux vrombissements pas très rassurants. Pas rassurants non plus le matelot occupé à vider l’eau de mer infiltrée dans la coque… Pour 50 000 francs la traversée, une vingtaine de personnes prennent place à bord, serrées en rang d’oignons. Gilets de sauvetage enfilés, on met le cap sur les îles de Loos. L’image n’est pas sans rappeler les embarcations de fortune des immigrés clandestins qui affrontent la Méditerranée. Je me tape l’Ayatal Koursiou en rafale pour chasser l’idée maléfique de ma tête.

      L’archipel des îles de Loos, situé à une dizaine de km à l’ouest du port de Conakry, est composé de trois îles principales : Kasa, Tamara et Room par ordre de distance de la terre ferme. Elles forment une sorte de demi-cercle autour duquel sont parsemés des îlots inhabités de faible importance. L’ensemble représente un certain havre de paix particulièrement prisé par les expats en quête d’exotisme et de loisir.

      Kasa, l’île la plus proche de Conakry est également la plus grande et la plus peuplée. Elle a été récemment érigée en sous-préfecture dans une certaine confusion des textes … A l’exception de quelques endroits, Kasa a la réputation d’être envahie et polluée ; donc moins attrayante. Ce n’est pas trop à mon goût.

      Tamara a un côté sauvage avec très peu d’habitations et d’hôtels. C’est encore une île vierge, toutes proportions gardées. Pour les amateurs de randonnées à la découverte d’endroits inédits, c’est la destination privilégiée. J’adore la randonnée, mais ce sera pour une autre fois.

      Je suis plutôt en quête de calme, d’air frais, d’eau turquoise et de sable fin, bref du romantisme en ce 14 février. Tout ce qu’offre Room, à 11 km des côtes de Conakry.

      Il est 10 heures tapantes. Le moteur de la pirogue pétarade de plus en plus fort. L’embarcation prend son élan et s’élance sur les commandes d’un mec baraqué à la peau en écailles, brulée par le soleil de Guinée. Un genou plié, il tient une barre de fer verticale en guise de gouvernail. De furtives images de « Dents de la mer » défilent dans ma tête. Dieu, sauve tes créatures…

      Pas sûr que le Seigneur m’entende puisqu’un groupe d’expatriés d’origine russe pèchent juste devant moi en buvant de la vodka à grandes lampées. Ils fument, nous enfument et dévissent bruyamment. Dans leurs conversations désarticulées reviennent pêle-mêle, la guerre à l’est de l’Ukraine, le statut de la Turquie en tant que pays européen ou non. Le tout noyé dans des effluves de vodka russe et de Marlboro.

      Une scène moins amusante que les plongées spectaculaires à la verticale des sternes qui capturent des petits poissons qu’ils emportent manger sur les berges du port de Conakry. La technique de pêche de ces oiseaux est bluffante !

      Voici Kasa qui défile à notre gauche. Sur les côtes rocheuses aux allures de falaises, des femmes sèchent de petites crevettes sur des pagnes colorés. Plus loin apparaît un hôtel en cases rondes surmontées d’un toit conique de tôle ondulée. Tout autour de l’île, des vieux pêcheurs solitaires, torse nu, bravent le soleil de midi et la mer à la recherche de quelques capitaines et de langoustes.

      Au bout d’une heure de voyage surgit l’île Room. A gauche de la petite bande de terre en forme de « 8 », une enfilade de résidences privées sur la plage, à droite le village de l’île. Au milieu de deux, entre une langue de sable et des rochers basaltiques, les pirogues déversent autochtones, touristes et randonneurs.

      Mon hôtel est situé sur l’autre versant auquel on accède par une ruelle rocailleuse qui serpente à travers une forêt de palmiers qui dandinent sous le vent. Ici, la plage est immaculée, quoique parcimonieuse. Le ressac des vagues sur les falaises, la pureté de l’eau et de l’air font oublier le tumulte de Conakry et vous plongent dans un calme romantique.

      En parlant de romantisme, beaucoup ignorent que la beauté de Room donna autrefois à l’écrivain écossais Robert Louis Stevenson le décor pour son roman mythique « L’Ile au trésor »! En tout cas, de petits malins ont flairé le trésor caché de l’île en y faisant pousser des hôtels aux tarifs qui frisent le scandale pour un service et un confort minimalistes. La chambre à 100 euros et un vague petit déjeuner qui dope votre appétit au maxi.

      Au resto de l’hôtel, le menu tracé sur un tableau noir annonce la couleur : deux tranches de filet de capitaine à 130 000 GNF. Je me suis sauvé pour retrouver les pêcheurs au village en contrebas. Au bout de quelques minutes de conciliabules, Naz, un grand gaillard, prend sa pirogue pour me ramener deux gros capitaines qui frétillent encore. Deux heures plus tard, ma femme et moi nous avions écaillé, vidé et grillé le poisson. Installés à l’ombre d’un baobab, le regard rivé sur l’île de Tamara de l’autre côté de la mer nous avons dégusté ces délicieux capitaines.

      Ça fait partie des bons plans de Room où je reviendrai plus souvent pour humer l’air pur et manger du poisson frais, les pieds dans l’eau. J’aime ce Conakry-ci.

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      Article : Covoiturage Bruxelles-Paris : quand les fraudeurs prennent le volant
      Découverte
      7
      20 janvier 2015

      Covoiturage Bruxelles-Paris : quand les fraudeurs prennent le volant

      Dans la Ford - crédit photo: Alimou Sow
      Dans la Ford – crédit photo: Alimou Sow

      Le « covoiturage ». Joli néologisme désignant l’utilisation d’une même voiture particulière par plusieurs personnes effectuant le même trajet. Ce mode de transport permet d’alléger le trafic routier et de partager les frais. Trouvaille à la fois économique et écologique. Désormais, des applications mobiles rendent la pratique ludique. Il est possible de choisir son trajet, réserver une place et même payer son frais de transport en quelques clics.

      A l’occasion d’un voyage Paris – Bruxelles, j’ai voulu tester le covoiturage. Manque de pot, je suis tombé sur des magouilleurs durs à cuire.

      Dimanche 10 h 30, gare du Midi au cœur de Bruxelles. Le thermomètre affiche zéro degré. Ressenti : -2, à cause du vent qui souffle. J’ai des acouphènes dans les oreilles et les mains transies. Un colosse de près de deux mètres, la tête à moitié enfoncée dans un bonnet rayé, m’intercepte.

      « Paris ?

      – Oui.

      – C’est par ici, venez. Donnez-moi votre sac. »

      Aidé d’un autre gaillard, mon interlocuteur – j’apprendrai plus tard qu’il se fait appeler Adolphe – entrepose mon sac à l’arrière d’un véhicule garé à l’angle des deux rues. Il m’annonce qu’il ne reste que trois personnes et que nous allons bientôt bouger pour Paris. Génial, je vais pouvoir voyager en dépit du fait que le covoitureur que j’ai réservé via l’application mobile a annulé son voyage in extremis. Ici, pas la peine de faire de réservation en ligne. Les gars sont prêts à tout moment. En somme, la « solution gare du midi » est tout bénef. Enfin, a priori.

      Première déception : le tarif : 30 euros le trajet Paris – Bruxelles ! Contre 20 euros à travers l’application, y compris les frais de réservations (on peut trouver même moins cher). Devant mon étonnement, Adolphe se montre ferme, mais joue les gentils. Il nous offre un café, mon accompagnateur et moi, en attendant le départ.

      Dix minutes plus tard, le véhicule est complet. Une, deux, trois, quatre…  neuf personnes y compris le conducteur Adolphe ! La porte coulissante de la Ford Transit se referme sur nous. Cap sur Paris. Personne ne semble être choqué de notre inconfort accentué par l’intérieur de la camionnette complètement en rade. Pas plus que moi ; j’ai vu pire sur les routes d’Afrique. Tant pis. Chacun fourre son nez sur son mobile. Ce n’est pas ce matin qu’on va socialiser…

      Ma voisine de siège est pendue au téléphone depuis une heure. Elle roucoule, sans doute avec un mec qui passe son dimanche sous la couette.  Le conducteur a la bonne idée de détendre l’atmosphère avec de la musique congolaise (RDC). Soukouss. Roumba. Il maîtrise les refrains de toutes les chansons qu’il imite en avalant des gâteaux roulés dans une feuille d’aluminium posée sur le tableau de bord à portée de main.

      J’ai compris que notre voyage risquait de partir en couille lorsque, à la première station d’essence, Adolphe demande à trois passagers de le régler afin qu’il puisse faire le plein de carburant. C’est pas bon signe ça, me dis-je intérieurement. Mais bon, comme on est en Europe…

      Après une heure et demie de trajet, le chauffeur annonce une pause pipi de 5 minutes à une station-service en territoire français. Il en profite pour demander aux autres passagers de s’acquitter de leurs frais de transport en toute discrétion. Il empoche 150 euros. On remet les gaz.

      L’autoroute du Nord est fluide. Le regard rivé sur l’asphalte, notre Adolphe siffle les refrains en dodelinant de la tête. Deux kilomètres après le second péage, un bruit bizarre se fait entendre de la voiture. Adolphe se rabat et se gare pour vérifier. Lui et moi mettons pied à terre. Un tour et mes soupçons se confirment : crevaison de la roue arrière gauche.

      « Tu as au moins une roue de secours ?

      Non, je n’en ai pas » ! J’ai d’abord pensé qu’il ironisait sur ma question débile jusqu’à ce que je l’entende pousser un juron en Lingala, « Mama nan ngaï », les deux mains croisées sur la tête. On est mal barré. La nouvelle fait l’effet d’une bombe dans la Ford d’où l’on s’extirpe l’air hébété. Les reproches pleuvent sur Adolphe qui encaisse sans broncher.

      Pour notre sécurité, le chauffard est prié de traîner le véhicule jusqu’à la bande d’arrêt d’urgence située quelques mètres plus loin et de poser le triangle de présignalisation. L’Adolphe n’a pas de triangle de présignalisation! Pas même de crique pour soulever le véhicule, encore moins de clé de roue pour démonter celle-ci. Et quelqu’un de sortir cette comparaison : « Même les charrettes tirées par un âne en Afrique valent mieux que ça », en désignant du menton notre vaisseau amiral Ford Transit. Nous sommes à exactement 42 kilomètres de Paris, bloqués sur l’autoroute A2 sans solution en vue.

      La tension monte. Le conducteur indélicat est sommée de nous trouver une solution dare-dare. Le gars est tellement imprudent qu’il n’a même pas de crédit sur son téléphone pour joindre ses comparses. On lui prête main forte. « Allô Pépé… Okenda Wapi… Bruxelles ? Oh là là !!! » Il raccroche le téléphone, le visage déconfit, et répète sans cesse : « Matata, Matata ».

      L’angoisse d’Adolphe grimpait à mesure que le temps passait. Huit passagers dans un véhicule déglingué et dépourvu de tout, faisant du transport illégal de personnes… il avait bien des raisons de s’inquiéter avec toutes ces forces de l’ordre qui se promènent, un couteau entre les dents, après les attentats contre Charlie Hebdo.

      Après une heure trente minutes d’attente, un de ses copains vient nous transbahuter à Paris, Porte de la Chapelle. Entre-temps, d’autres covoitureurs avaient déjà appelé des proches pour venir les chercher.

      Le covoiturage est un bon plan pour voyager à moindres frais. Malheureusement, des fraudeurs se sont engouffrés dans la brèche, profitant des failles du système. Au détriment des usagers. En France la loi punit lourdement le transport illégal des personnes (trois ans de prison et 45 000 € d’amende), mais rien n’empêche quelqu’un de transporter des personnes dans sa voiture. Ce qui est interdit, c’est de les faire payer au-delà des droits de péage et des frais de carburant.

      Bon bref, c’est assez flou pour décourager des types comme Adolphe qui peuvent se taper jusqu’à deux aller-retour Paris-Bruxelles par jour, à raison de 240 euros par voyage. Sortez vos calculettes pour voir combien ils peuvent gagner par mois.

       

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      L'auteur: SOW
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